RESSUSCITÉ ?

Imaginons un instant que quelques journalistes munis de caméscopes se soient promenés sur les routes de Judée et de Galilée au cours des 30 première années de notre ère; qu'auraient-ils vu et quel témoignage nous auraient-ils laissé sur la personne du rabbi Jésus de Nazareth ? Voici une question à laquelle il nous est tout simplement impossible de répondre.

Car si les évangiles nous disent quelque chose sur les événements qui se sont alors passés, ce ne sont pas des récits journalistiques ni de simples photos des événements, mais un témoignage de la foi des chrétiens de la seconde moitié du 1er siècle.

En fait de témoignages d'hommes ou de femmes extérieurs à la foi chrétienne, force nous est de constater que le passage de Jésus n'a laissé à peu près aucune trace dans la documentation profane de l'époque : il est tout simplement passé inaperçu de ce qui fait l'histoire du monde. Ah comme nous aimerions pouvoir retrouver son extrait d'acte de naissance à la mairie de Bethléem, ou une minute de la décision de Pilate condamnant à mort cet agitateur, un 14 du mois de Nissan de l'an 30. Mais non, rien, éternellement rien !

En dehors des textes chrétiens, il n'existe en fait que de rares données profanes où le nom de Christ est cité : un édit de l'empereur Claude, daté de 49 (ou peut-être 41), chassant les juifs de Rome, qui nous est rapporté par l'écrivain Suétone : "Comme les juifs se soulevaient continuellement à l'instigation de Chrestos, l'empereur les chassa de Rome." On connaît aussi un texte de l'historien Tacite, écrit avant l'an 120 qui mentionne les premières persécutions contre les chrétiens : "Néron livra aux tourments des gens que la foule appelait chrétiens. Ce nom leur vient de Chrestos que sous le principat de Tibère, le procurateur Ponce Pilate avait livré au supplice."

De ces textes, auxquels on pourrait ajouter quelques autres, on ne peut guère tirer qu'un résultat qui demeure acquis : jamais, aux temps les plus anciens, l'existence même de Jésus ne fut mise en doute. Ceci est une affirmation importante alors que des courants se sont levés depuis lors pour contester ce fait et mettre en doute même l'existence humaine de Jésus de Nazareth.

Mais cela ne nous donne pas un autre regard sur la personne et l'enseignement de Jésus que celui qui nous est donné par les écrits canoniques.

Dans ces derniers, l'aventure de Jésus apparaît comme s'achevant sur l'échec de la Croix : les disciples sont dispersés, il ne reste que quelques femmes, 2 ou 3 hommes (Jean, Joseph d'Arimathie, Nicodème..). D'autres repartent le lendemain du sabbat, tout dépités de cette aventure qui s'est ainsi achevée sur la mort de leur maître.

Que s'est-il donc passé entre ce vendredi soir de l'année 30 et l'année 49 où le nom de Chrestos réapparaît dans le document de Claude cité plus haut ?

Oui, que s'est il passé entre ce vendredi et la rédaction de la première lettre aux thessaloniciens, datée de l'an 50/51 soit 20 ans après ces événements, dans laquelle Paul dit : "Dieu a ressuscité Jésus d'entre les morts" et parle de ce Christ à des habitants de la lointaine Macédoine, en le présentant comme "le Seigneur" ?

Comment expliquer que des hommes qui repartaient dépités et sans espérance, deviennent en si peu de temps les porte parole d'une nouvelle tellement hors norme ? on ne peut nullement prétendre qu'ils attendaient ce fait avec une telle certitude qu'ils ont cru vrai ce dont ils avaient rêvé : tout nous dit le contraire, et leur foi n'est survenue qu'après bien des tâtonnements, comme en témoignent le comportement de Thomas et celui des autres apôtres au témoignage de saint Marc : "en l'entendant dire qu'il vivait et qu'elles l'avaient vu, ils ne la crurent pas."(Mc 16,11) et à celui de saint Luc : "ces propos leur semblèrent du radotage, et ils ne les crurent pas." Et encore, Pierre "retourna chez lui, tout surpris de ce qui était arrivé." (Lc 24,11 et 12).

Il a certainement fallu un événement exceptionnel pour que, quelques dizaines d'années plus tard, le nom de Christ soit connu jusqu'en Grèce, non pas comme celui d'un vulgaire condamné mais comme l'inspirateur d'un mouvement religieux lié au judaïsme, et cependant distinct. Cet événement exceptionnel, qui a eu l'effet d'une véritable déflagration nucléaire, à la suite des apôtres, nous en parlons sous le nom de RÉSURRECTION : nul n'en fut témoin, nous ne le connaissons que par ce qu'en ont dit les disciples : "Dieu l'a fait Seigneur et Christ ce Jésus que vous avez crucifié."

DES PREUVES ?

L'évangile ne nous donne aucun récit de la résurrection elle-même, aucune description d'un phénomène que des témoins auraient pu saisir et photographier. Il n'y a donc pas de preuves, au sens que donnent à ce mot les sciences exactes : la foi chrétienne ne s'appuie pas sur des preuves mais sur des témoins, des hommes et des femmes qui nous rapportent ce qu'ils ont vu; or que nous disent ils ? Il nous rapportent 2 signes qui témoignent de ce phénomène :

- d'abord le tombeau vide; c'est un fait impressionnant, mais il semble que sa découverte n'ait pas modifié sensiblement le comportement des disciples puisque deux d'entre eux, repartant sur le chemin d'Emmaüs, en parlent à leur mystérieux compagnon sans que l'on constate que cela les ait conduits à croire en sa résurrection;

Le second signe est plus important, il s'agit des apparitions. Les textes en parlent largement, et on ne voit guère comment le fait pourrait être nié. Sans cela, à moins de croire en une supercherie magistrale, le christianisme dans son ensemble devient totalement inexplicable. Le témoignage des apôtres est sans équivoque. Doit-on croire qu'ils se sont trompés, ou qu'ils ont voulu nous tromper ?

QUE NOUS DISENT CES SIGNES ?

Tout d'abord que la résurrection de Jésus n'est pas un simple retour à la vie : le corps de Jésus n'appartient plus à notre univers physique de l'espace et du temps, sa résurrection n'a rien à voir avec celle de Lazare ou d'autres personnages ramenés temporairement à la vie, mais morts à nouveau quelques semaines ou quelques années plus tard. D'ailleurs les chefs du peuple n'avaient nullement contesté la résurrection de Lazare, ils avaient simplement conclu à la nécessité de le supprimer, tandis qu'ils nieront la résurrection de Jésus: elle n'est pas du même ordre.

Mais ils nous disent aussi que Jésus est désormais vivant pour toujours, d'une vie nouvelle, différente de celle qu'il a connue durant les 30 années passées sur la terre de Palestine. Nous disons qu'il est vivant, mais nous ne le voyons pas; et cependant il s'est fait voir à quelques uns dont l'apôtre Paul donne une liste " et la plupart d'entre eux sont encore vivants" dit-il aux chrétiens de l'Eglise de Corinthe dans une lettre que l'on date de l'an 54 (I Co 15, 3-8).

Il s'est fait voir, et c'est toujours lui qui a l'initiative de cette vision, mais ceux qui l'ont vu ne l'ont pas reconnu avant qu'il ne se soit fait reconnaître et là encore il a l'initiative de cette reconnaissance : on le prend pour le jardinier, pour un voyageur, ce qui semble invraisemblable de la part de personnes qui parlaient avec lui quelques jours plus tôt. C'est bien le signe que son mode de présence est différent et qu'il faut un acte de foi pour passer de la rencontre avec cet inconnu à la découverte de Jésus ressuscité.

Pour les premiers disciples, la résurrection de Jésus ne s'est pas présentée comme un prodige entraînant l'évidence; ce serait contraire à tout son comportement, car il a toujours refusé de faire des signes "pour épater la galerie". Elle n'a été comprise qu'à la suite d'une série de signes sollicitant la foi, à la lumière d'une nouvelle compréhension de la parole de Dieu.

Il en va pour nous comme pour les premiers témoins : la foi en la Résurrection n'est pas une évidence, sinon ce serait totalement déraisonnable de ne pas croire alors que nous ne pouvons que respecter ceux qui ne l'acceptent pas. Elle est un don qui nous a été fait, de comprendre, à partir d'un certain nombre de signes, à partir du témoignage des apôtres transmis depuis 20 siècles par des hommes et des femmes qui en ont été les témoins, à partir d'une expérience de vie, une réalité totalement neuve et inédite: "Jésus est vivant pour les siècles"; il vit en son Eglise, il vit dans le cœur de tout homme qui croit en lui, il nous appelle à vivre avec lui et à devenir participants de cette vie nouvelle en quittant tout ce qui en nous ne peut que vieillir et disparaître.

La foi, c'est "marcher comme si l'on voyait l'invisible". Elle s'appuie sur le témoignage des apôtres et sur une expérience personnelle, une adhésion de tout l'être à la personne de Jésus mort par amour pour les hommes, et ressuscité par la puissance de l'Esprit pour nous rendre participants de sa nature divine..

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