-Editorial-
Taggia, le 21 janvier 1997
Au désespoir d'une jeunesse déboussolée qui tente de s'étourdir dans la recherche du succès, de la drogue ou du sexe, beaucoup proposent des valeurs humaines depuis longtemps reniées par l'occident. Ces valeurs sont réelles, mais aucun idéal, fut-il le plus beau, ne peut délivrer notre coeur des ténèbres qui l'étouffent mortellement. Nous avons perdu Dieu. C'est notre vrai malheur, le seul qui fasse pleurer amèrement les saints...
Ce n'est donc pas la beauté qui sauvera le monde, mais le Christ et rien que le Christ. Voilà le cri de Van! Voilà sa joie! Voilà son espérance!
Au vide qui tourmente tant les jeunes il n'y a qu'une réponse nous dit saint Paul, et c'est celle de la Croix, "folie pour ceux qui se perdent, mais pour ceux qui se sauvent, puissance de Dieu". Cettefolie divine échappera toujours "aux sages et aux intelligents" qui ne sauront jamais voir dans le visage "sans beauté ni éclat" du Crucifié la joie de Dieu. Et pourtant c'est bien cette joie qui brûlait de bonheur le coeur de Van livré à la cruauté des hommes.
C'est elle que le Bon Larron a reconnue, lui qui n'avait vu aucun des miracles accomplis par Jésus.
C'est elle qui faisait dire à sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus dans la souffrance et les ténèbres: "Mon âme est dans une paix surprenante". C'est elle, et elle seule, qui anime et fait vivre l'Eglise depuis toujours et pour toujours...
Mais comment voir dans le Christ en croix la joie de Dieu? Comment ne pas perdre la foi devant ce spectacle où la mort semble triompher comme elle semble le faire encore aujourd'hui avec insolence partout dans le monde?
Certainement pas à coups de bonne volonté, comme le manifeste la trahison de saint Pierre qui pourtant ne manquait pas de courage, mais en devenant, à la suite de la petite Thérèse et de Van, un de ces enfants auxquels le Christ a promis le Royaume des Cieux. En effet, eux seuls peuvent regarder la Croix et y voir le mystère de la Toute Puissance dont la douceur ne ressemble à rien si ce n'est à une faiblesse insondable. Eux seuls savent que Dieu est un enfant innocent, sans défense, et qu'il nous aime en tremblant parce qu'il a peur de notre dureté, bien plus implacable que toutes nos cruautés et nos délires.
Folie d'un Amour qui trouve sa joie éternelle et sa victoire sur le mal à ne mettre aucune limite à sa faiblesse devant l'orgueil des hommes. Incroyable pouvoir de cette liberté capable de refuser et de blesser un tel Amour mais aussi de l'accueillir et de le consoler par le repentir et la confiance. Aucune sagesse humaine ne peut entrer dans un tel mystère, il y faut la souplesse des enfants ou des paumés qui se laissent entraîner, blottis dans les bras de la Sainte Vierge, par le vertige de la Croix pour y trouver la Joie et la Paix de Dieu.
Voilà le message de Van aux jeunes. Il est fou! Certes. Mais comment ne pas être séduit par cette folie qui illumine de joie et de paix son regard...
fr. Bruno-Marie Simon o.p.