La Sainte Ampoule (1)

 

Article paru dans <<Le Journal du XVème Centenaire>> 
Abbé Jean Goy: la sainte Ampoule de Reims (1)

La victoire du catholicisme sur l'arianisme fut le premier miracle opéré par le baptême de Clovis. L'histoire des origines de la sainte Ampoule en est un second. L'abbé Jean Goy en deux études successives, nous présente les grandes étapes de formation de cette tradition rémoise.

L'histoire de la sainte Ampoule se situe entre deux silences celui, d'abord, des contemporains du baptême de Clovis alors que certains étaient pourtant friands de raconter des miracles, comme Grégaire de Tours qui décrit la scène : " Le roi demande, le premier, le baptême au pontife. Nouveau Constantin, il s'avance vers le bain qui doit enlever la lèpre invétérée qui le couvrait ; il vient laver dans une eau nouvelle les taches hideuses de sa vie passée. Comme Il s avance vers le baptême, le Saint de Dieu lui dit, de sa bouche éloquente "Courbe humblement la tête, Sicambre, adore ce que tu as brûlé et brûle ce que tu as adoré ". Beaucoup d'autres contemporains firent mention de ce baptême, sans parler de l'événement merveilleux de la sainte Ampoule envoyée du ciel. La liste des témoignages serait longue à énumérer. On peut mentionner, par exemple, celui de saint Avit, évêque de Vienne, qui écrit à Clovis pour le féliciter. Mais c'est aussi le silence des contemporains d'Hincmar, de ceux qui participent au sacre de Charles le chauve, en 869, comme roi de Lotharingie: Hincmar préside la cérémonie. en présence de tous les grands du royaume et des évêques. Parmi eux l'archevêque de Sens qui, en tant que métropolitain de Paris, pouvait avoir des prétentions à être l'évêque du sacre. Hincmar, parlant du baptême de Clovis. peut dire que celui-ci fût oint " par le chrême reçu du ciel, dont nous avons encore ". Et personne n'a protesté. Par la suite, Hincmar va préciser les choses en écrivant la Vie de saint Rémi " Le chrême vint à manquer et, à cause de la foule du peuple, on ne pouvait aller en chercher. Alors, le saint prélat, levant les yeux et les mains au ciel, commença à prier en silence, et voici qu'une colombe, plus blanche que la neige, apporta dans son bec une petite ampoule pleine de saint chrême. Tous ceux qui étalent présents furent remplis de cette suavité inexprimable, le saint pontife prit la petite ampoule, la colombe disparut et Rémi répandit de ce chrême dans les fonts baptismaux..." Et pendant des siècles, les voix les plus autorisées, les ennemis les plus acharnés, mentionneront notre petite fiole et son on origine céleste papes, évêques, théologiens. historiens et polémistes parleront de la sainte Ampoule comme d'un fait admirable, mais bien réel.

Dom Marlot dans son livre sur le sacre Le théâtre d'honneur et de magnificence... en donne une anthologie. Mathieu Paris, historien anglais dira, vers 1250 dans son Histoire d'Angleterre " que le roi de France est le premier des roys de la Chrétienté pour la céleste liqueur dont il est oint en son sacre ". Saint Thomas d'Aquin, à peu près à la même époque dit, dans son Traité du gouvernement, " que nos roys sont sacrés d'une onction envoyée du ciel par le ministère d'une colombe ". Le pape Paul III, en 1545, dans la bulle de création de l'université de Reims, cite, dans ses motifs, qu'à Reims, "les Rois très chrétiens reçoivent la grâce de la sainte onction envoyée du ciel ".

Ce n'est qu'au XVII° siècle qu'apparaît le premier détracteur, le franc-comtois Jean Jacques Chifflet Dans son traité sur l'ampoule rémoise, alors qu'il est bien crédule sur d'autres points, il tient à renverser la longue tradition du miracle rémois. Il met, principalement, en avant le silence des contemporains de l'événement.

Néanmoins, il semble difficile d'admettre qu'au milieu de l'admiration générale, Hincmar ait créé la légende de toutes pièces. Il avait donc des motifs sérieux pour appuyer ses dires. Malheureusement, Hincmar ne nous a pas directement donné ses sources, et Jamais nous ne saurons la vérité, mais peut-être pourrons nous l'approcher. Depuis le XVII° siècle, les historiens ont avancé différentes possibilités de solutions. il est fort probable que la vérité se trouve dans un savant dosage entre plusieurs d'entre elles.

Abbé Jean Goy Historien, archiviste de l'archevêché

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m.a.j. le 21/04/02