CONSEILS POUR LA PRIERE (5) par Le Père Matta el-Maskîne, Père du Monastère de saint Macaire en Egypte (Copte)

 

La prière, invitation divine au retour de la créature exilée

La prière véritable, dans laquelle nous avons accès auprès de Dieu et nous parlons en sa présence, n'est pas un simple acte humain. Elle est essentiellement une invitation divine à laquelle nous ne faisons que répondre. Dieu est toujours et en tout temps disposé à nous recevoir et il ne cesse de nous inviter à venir vers lui: " Tout le jour j'ai tendu les mains (Rom. 10,21) "... " Venez à moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et moi je vous soulagerai (Matth. 11,28) ". " Celui qui vient à moi, je ne le jetterai pas dehors (Jn 6,37) ". Car Dieu se réjouit de m'avoir auprès de lui; et si possible de façon permanente.

Lorsque nous nous tenons devant Dieu, en sa présence, nous réalisons en fait le retour de la créature exilée vers le sein de son Créateur, à l'instar du retour d'Adam au Paradis. Aussi la prière est-elle, en soi, une réparation des longues heures passées loin de Dieu parmi les préoccupations de la terre et les soucis de la vie temporelle (Luc 21,37). En soi, la prière représente un retour à Dieu, une véritable conversion. Dieu, autrefois, a chassé Adam de sa présence, et le voici maintenant qui nous appelle sans cesse, " tout le jour" , à entrer en sa présence et à rester avec lui. Une fois que nous sommes entrés auprès de lui par la prière, Dieu désire que nous ne ressortions plus jamais. Aussi la prière véritable, qui a réussi à répondre au désir bienveillant de Dieu doit-elle continuer secrètement au fond du coeur, par un échange sans paroles, après que nous ayons quitté le lieu de la prière. Nous allons alors à nos diverses occupations, tandis que la prière ne cesse de continuer son travail secret à l'intérieur de nos coeurs. Nos soucis: Comment les présenter dans la prière ?

La prière n'est pas l'occasion de demander à Dieu ce qui importe à la chair (Rom. 8,7 ; Jac 4,3), ce qui nous fournit le bien-être, facilite nos travaux et favorise nos responsabilités temporelles. La prière est l'occasion pour l'esprit d'accéder au Royaume. Elle est la fenêtre rayonnante par laquelle nous contemplons déjà la Vie éternelle, vers laquelle nous serons emportés, après avoir remis ce corps à la poussière, tandis que tous nos travaux et nos responsabilités seront terminés à tout jamais. Tout ce qui nous préoccupe sur la terre est éphémère; mais la prière, elle, n'est pas éphémère. Toute minute passée dans la prière vient de l'éternité et y retourne. Nous devons donc, dans la prière, présenter, nos soucis dans une perspective spirituelle. C'est-à-dire que tous nos besoins matériels, nos activités, nos responsabilités et nos préoccupations doivent être présentés à Dieu, dans la prière, afin qu'il les dépouille de leur forme mortelle, éphémère, et qu'il les revête d'un caractère divin en les rendant conformes à son dessein bienveillant et qu'ainsi ils soient sanctifiés. Nous ne demandons pas dans la prière que nos travaux soient prospères, que nos responsabilités réussissent et s'étendent pour en retirer une gloire terrestre, un renom ou la tranquillité et le bien-être matériels. Mais ce que nous demandons plutôt à Dieu dans la prière, c'est qu'il purifie nos travaux de l'esprit d'égoïsme et d'amour-propre, c'est-à-dire de ce qui fait la gloire du " moi " humain, qu'il nous inspire rectitude de la pensée et du coeur, afin que, dans nos travaux, nous n'usions pas de malice, de duplicité, de malhonnêteté, de fraude ni de mensonge; qu'il nous accorde la puissance spirituelle de ne pas craindre les menaces, de ne pas nous esquiver devant les dangers, de ne pas faire acception des personnes et ne pas nous lamenter quand nous sommes atteints par la perte ou l'injustice. Nous lui demandons de nous faire estimer les valeurs spirituelles au-dessus de toute activité et de toute responsabilité, de sorte que nous prenions la défense de l'innocent, que nous fassions l'éloge de la rectitude et de l'intégrité, que nous donnions avec générosité et que nous tenions à conserver la patience et la charité plus qu'à tout intérêt matériel.

La prière devient ainsi l'occasion de transformer les désirs de la chair en désir de l'esprit, et le moyen de purifier nos oeuvres, nos pensées et nos intentions des scories du péché.

Nos activités temporelles seront ainsi sanctifiées, et, quelque humbles et communes qu'elles soient, elles deviendront dignes d'être offertes à Dieu au même titre que les plus nobles services religieux.

[à suivre]

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